Une folie de lecture en mars 2022

 À la suite d’un article sur mon blogue abordant le lien entre la peinture et l’art narratif dans les romans de Virginia Woolf, j’ai décidé de me procurer Romans, essais de l’écrivaine dans la collection Quarto de Gallimard. J’ai donc eu ce livre en mains hier et il compte 1 371 pages. En même temps je me suis retrouvé avec le dernier roman de Stefansson, Ton absence n’est que ténèbres, et je note qu’il compte 606 pages.

 J’ai dans la même collection, Écrire la vie d’Annie Ernaux. On retrouve dans cette collection un aperçu passablement détaillé de la vie des auteurs et celui de Virginia Woolf m’a fait découvrir des aspects nouveaux que je ne connaissais pas. Pourtant j’ai lu plusieurs romans de l’écrivaine dans l’édition Folio et j’ai aussi fouillé deux anciens numéros du Magazine littéraire qui datent de 2004 et 2012.

Ce qui est aussi particulier de cette édition c’est que l’on aborde à la fois les romans et les essais de Virginia Woolf. On peut lire à la page 7 : « Une autre originalité de ce Quarto est de rassembler dans le même ouvrage deux genres que l’on sépare généralement chez Virginia Woolf, le roman et l’essai. Comme s’ils n’avaient rien à voir entre eux. »

Des cinq romans qu’on retrouve dans cette édition, j’en ai lu trois : Mrs. Dolloway, Vers le phare et Les Vagues. Je veux lire Orlando, le livre dont elle parle à plusieurs occasions dans son Journal intégral. Il me tarde aussi de lire Les Années, un roman que bien peu de gens semblent avoir lu. Deux essais sont aussi publiés dans cette édition : Une chambre à soi et Trois guinées.

En cette soirée du 3 mars, j’ai parcouru la section «Vie et oeuvre», qui ouvre le volume et j’ai pris quelques notes que je transcris mot à mot. On souligne que ce sont les seules lignes du bouquin qui ne sont pas de la plume de Virginia Woolf :

Les trois filles sont ravissantes, Julia en particulier, qui posera pour plusieurs peintres préraphaélites.

Julia se marie en 1867 et elle a 21ans. Son mari est Herbert Duckworth et il est avocat.

Elle est enceinte de son troisième enfant quand son mari meurt. S’en suit une terrible dépression. 

Elle épouse en 1878  Leslie Stephen.

À 37 ans, elle avait donné naissance à sept enfants. 

La famille est une famille très étendue, lettrée, aisée sans être riche.

Le grand-père de Virginia, James Stephen, est très cultivé. On note chez lui de la morbidité. Il a fait plusieurs dépressions.

Leslie doit beaucoup à cet héritage physique et culturel. La recherche d’une maison en Cornouailles pour les vacances estivales est liée au désir de mettre ses enfants en contact avec la nature.

Leslie a eu de son premier mariage avec Minny, une fille, Laura, handicapée mentale et difficile à maîtriser.

Vanessa naît en 1879.

Thoby en 1880.

Virginia en 1882.

La naissance de Virginia survient dans une période de tension très forte entre Leslie et Julia en raison des longues absences répétées de Julia auprès des membres de sa famille malades ou mourants. 

Adrian, le dernier enfant, naît en 1883.

En 1884, elle subit des attouchements de son demi-frère, Gerald Duckworth. Elle en fait mention dans le texte Une esquisse du passé

Un texte de Virginia de l’année 1891 où elle parle de son frère Adrian est significatif : 

« le Dictionary of National Biography l’a broyé avant qu’il soit né. Il m’a aussi un peu fêlé la cervelle. Sans cette contribution à l’histoire de l’Angleterre, je ne serais pas aussi intelligente, mais je serais plus équilibrée. »

À 11 ans, elle a peur de traverser la rue.

Sa mère meurt en 1895. C’est Stella, sa demie-soeur qui va s’occuper de la maison. 

Quant à Leslie, ses épanchements auprès de sa belle-fille dépassent toute mesure. 

Stella se marie en 1897 et elle meurt au retour de son voyage de noces.

On évoque aussi les liens bien particuliers des Duckworth avec les deux soeurs, Vanessa et Virginia ainsi qu’avec Julia.

En 1902 Leslie décède d’un cancer de l’intestin.

En cette même année Virginia fait la rencontre de Violet Dickinson.

On peut lire le passage suivant à la page 26 de l’édition Quarto :

« Pendant cinq ans, Violet a été essentielle pour Virginia, assurant le rôle difficile et parfois exaspérant du mère de substitution, bureau des plaintes, soutien psychique et principal interlocuteur de la jeune fille exigeante qui veut devenir écrivain. »

Violet est née en 1865 et elle a 17 ans de plus que Virginia. Une correspondance entre entre les deux commence en 1902. On s’est interrogé sur la nature exacte des relations entre ces deux femmes. Vanessa Curtis a écrit :

« … regardless of the question marks that still hang over the exact nature of their early relationship, there can be no denying that Violet was the first true emotional and physical love of Virginia’s early adult life »

Elles vont se rapprocher deux ans plus tard suite à la mort de Leslie Stephen.

Dépression de Virginia et tentative de suicide.

J’en suis là dans ma lecture en ce jour du 4 mars 2022.

On sait que la vie n’a pas été facile pour cette femme qui s’est suicidée en mars 1941. De nombreuses dépressions et des tentatives de suicide. Je transcris le dernier paragraphe du Journal intégral à la page 1 527. Ce paragraphe est précédé des mots suivants : 

« Dans sa réponse à Vanessa, écrite probablement le 23 mars, V.W. reconnaît que « l’horreur a recommencé » au cours des dernières semaines, et explique qu’elle est persuadée de devenir folle et que, cette fois, elle ne s’en remettra pas. Ce jour-là, un dimanche, les Woolf rendirent visite à Mrs Chavasse au village. Le lendemain, alors que V.W. écrit pour la dernière fois dans son journal, Leonard note dans le sien : « V. : un léger mieux. »

Et ce dernier paragraphe se lit ainsi :

« John Lehmann avait écrit à V.W. une lettre enthousiaste à propos d’Entre les actes, dont il avait déjà annoncé la parution pour le printemps par la Hogarth Press. Mais le doute et la dépression gagnant du terrain, V.W. lui envoya une lettre d’excuses, lui expliquant qu’elle trouvait décidément le livre trop stupide et trivial et qu’elle tenait à le réviser avant sa parution à l’automne. L.W., alarmé par son état de santé moral et physique, et par les funestes symptômes de la dépression, persuada alors V.W. de voir Octavia Wilbeerforce, en médecin et amie. C’est dans ce but qu’il la conduisit à Brighton le jeudi 27 mars. Le lendemain matin Virginia se noya dans la rivière Ouse. Leonard retrouva sa canne sur la berge près du pont tournant de Southease. On retrouva son cadavre quelque trois semaines plus tard sur l’autre rive de la rivière. Son corps fut incinéré le 21 avril et Leonard enterra ses cendres sous l’un des grands ormes situées le long de l’allée qui servait de pistes de boules, dans le jardin de Monks House. »

Difficile de lire de tels mots suite au suicide d’une écrivaine que j’apprécie tellement. Ces romans sont fameux, brillants et en relisant son roman Vers le phare, en même temps que Madame.lit j’en demeurai ébloui en fouillant chacune des pages du roman.

J’ai fait mention de la vie difficile de Virginia Woolf en évoquant ses dépressions et ses tentatives de suicide. D’autres faits sont à noter : Virginia a treize ans à la mort de sa mère et vingt-deux au moment où son père meurt. Elle perd son frère Toby deux ans plus tard. Sa mère aussi a fait une dépression, son grand-père aussi et la fille du premier mariage de Julia, Laura était une handicapée mentale.

La vie dans leur domaine en Angleterre n’est pas facile. La présence des Duckworth ne facilite pas les choses. C’est Stella, la fille du premier mariage qui s’occupe de la maison quand Julia décède. De plus les deux fils, George et Gerald se permettent des attouchements sur Virginia. On souligne aussi dans la présentation de l’écrivaine chez Quarto la profonde dépression de son mari, dépression qui l’incite à démissionner du poste qu’il occupe. Et dire que la dépression de Virginia en 1911 avait duré une année complète. L’amour pour Virginia ce n’est pas facile. Dans une lettre qu’elle envoie à son futur mari on peut lire les mots suivants :

« …quand je suis avec vous il existe un sentiment permanent et croissant. Bien sûr vous voulez savoir si ce sentiment me poussera jamais à vous épouser. Comment dire? Je pense que oui, parce qu’il ne semble pas y avoir de raison pour le contraire, mais je ne sais pas ce que l’avenir nous réserve. Je me fais un peu peur. J’ai parfois l’impression que personne n’a pu ni ne pourra jamais partager quelque chose. C’est à cause de cela que vous me trouvez semblable à une montagne ou à un rocher. »

Elle se marie en 1912 et fait une tentative de suicide en 1913.

Je retiens de ce texte de Jon Kalman Stefansson les lignes qui vont suivre. Ce texte est particulier car il est comme un avant-propos de son dernier roman qui a pour titre : Ton absence n’est que ténèbres.

« Vos gênes charrient vos émotions, souvenirs, expériences et traumatismes d’une vie à une autre, et dans ce sens, certains d’entre nous sont vivants longtemps après leur disparition, y compris lorsqu’ils ont sombré dans l’oubli. Nous portons perpétuellement en nous le passé… »

On peut se demander si les ancêtres de Virginia peuvent être un des causes de beaucoup des malheurs de la vie de l’écrivaine. Et dire que j’aime tellement l’oeuvre de cette écrivaine britannique.

 Vous allez certainement me dire qu’il est peut-être préférable de lire les romans, les essais d’un écrivain en oubliant ce que l’on sait de sa vie. Je pense qu’il ne peut en être ainsi dans l’oeuvre de l’écrivaine britannique. L’image que vous voyez provient du dossier qui lui est consacrée dans le numéro d’avril 2012 du Magazine littéraire. Le titre de l’article est : Oser être soi-même et on peut lire les mots suivants dans la présentations de l’article :

 « Cette vie-là, encore moins que toute autre, ne peut se réduire aux seuls jalons chronologiques. Nul coup de théâtre, nulle extravagance, mais une sourde lutte contre le gouffre, qui se joua imperceptiblement « entre les actes. »

Si vous regardez attentivement le texte sous la page de gauche vous pourrez lire :

« Peut-être n’ai-je rien fait d’autre qu’approcher l’autobiographie. »

Avez-vous aimé cet article? Cet article vous donne-t-il le goût de lire des romans de Virginia Woolf?

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Parenté de la peinture et de l’écriture narrative

Bonjour,

J’ai décidé d’aborder sur mon blogue, les livres de la grande écrivaine britannique, Virginia Woolf. Pourquoi? J’aime beaucoup la plume de cette dernière et il y a quelques semaines, j’ai relu un de ses livres et je me suis dit que j’avais envie de rédiger un article pour jeter un nouveau regard sur son univers. J’espère que vous aimerez cette chronique!

Le point de départ de ce sujet pourrait être les propos de Pierre Nordon dans le dossier consacré à Virginia Woolf dans le numéro de décembre 2004 du Magazine Littéraire :

« (…) car l’une des innovations les plus marquantes de Virginia est d’avoir volontairement transposé en littérature la pratique des impressionnistes. La Promenade au phare marque avec le personnage de Lily Briscoe, cette parenté de la peinture et de l’écriture narrative. »

Dans le premier article du dossier consacré à Virginia Woolf dans le numéro d’avril 2012, on peut lire les propos suivants d’Augustin Trapenard :

 (…) son projet visionnaire d’élargir l’idée que nous nous faisons du roman?. En étudiant précisément la plasticité de ses romans – en particulièrement l’entremêlement des arts que sont la littérature et la peinture la photographie ou même le cinéma -, ne voit-on pas se dessiner comme une brèche ouverte sur un au-dessus du texte? »

Alexandra Lemasson a consacré un livre à Virginia Woolf. Je note deux passages d’une même page de son livre :

« (…) dans La Promenade au pare les problématiques relatives à l’écriture et à la peinture finissent par se rejoindre.

L’écrivaine poursuit avec les mots suivants :

« le mot de la fin revient à Lily, le peintre. J’ai eu ma vision, dit-elle. Voilà la seule chose qui compte désormais pour Virginia qui va lui consacrer le restant de son existence. Écrire pour tenter de retranscrire avec des mots ce que sa sœur transcris en couleurs.

Je me suis permis de citer trois auteurs qui viennent confirmer le titre de mon article. Si j’ai insisté c’est qu’il n’est pas facile de trouver des mots des romans de Virginia qui viennent appuyer ces propos. Je pense, dans un premier temps,  à deux façons de comprendre : trouver des propos de Virginia dans son Journal intégral qui appuient ces propos et ensuite tenter de commenter quelques uns des tableaux peints par la sœur de Virginia, Vanessa.

Je vais tenter d’illustrer cela en vous montrant à la fin de mon article des photos des tableaux de Vanessa, la sœur de Virginia. On en retrouve cinq ou six dans le numéro du Magazine Littéraire d’avril 2012. Quand j’ai terminé la lecture du roman en même temps que Madame lit, comme je l’ai souligné, je suis retourné vérifier la documentation que je possédais sur Virginia Woolf et j’ai retrouvé ce numéro. En observant les photos je pensais à des passages du roman qui pourraient illustrer de tels propos.

Un autre passage du livre d’Alexandra Lemasson est intéressant :

« Dans La Promenade au phare, Virginia donne une illustration de la relation si complexe qu’elle entretient avec sa sœur. Lily Briscoe, jeune peintre qui se débat tout au long du livre avec un tableau, lui ressemble comme une sœur. Une expression à prendre au pied de la lettre puisque Lily, à sa manière, fait la synthèse de Vanessa et de Virginia. »

Lily Briscoe est vraiment un personnage important dans le roman La Promenade au phare. On la voit au début du roman installée avec son chevalet en train de peindre un tableau d’une femme avec son enfant. Ces deux personnages sont Mrs Ramsay et son fils qui veut tellement aller au phare. On retrouvera la peintre dans la dernière partie du roman. Le roman se termine au moment où Lily a complété son tableau. Un passage significatif de la préface de Françoise Pellan illustre ce lien entre la peinture et la littérature :

« Du point de vue de la forme et de la technique narrative, l’œuvre ne respectait cependant pas davantage les conventions du genre romanesque et n’était pas moins de nature à déconcerter ses premiers lecteurs. Empruntant au domaine pictural le principe de sa composition, elle se présente sous la forme d’un triptyque. »

Un passage du chapitre 4 du roman nous lance dans une autre direction pour comprendre ce lien entre la peinture et la littérature. On évoque le travail de Lily en train de peindre :

« C’est dans ce passage éclair de l’image à la toile que l’assaillaient les démons qui souvent la mettaient au bord des larmes et rendaient le passage de la conception à l’exécution aussi redoutable que l’est pour un enfant la traversée d’un couloir obscur. »

Pour bien faire voir ce rapprochement entre les deux arts j’ai retrouvé dans le Journal des propos de ce qui se passe entre une pensée et le mot que l’on met sur papier. C’est un texte de 1026 dans lequel s’exprime sur le roman qu’elle entreprend, Vers le Phare :

« Car c’est bien ce que serait le livre entièrement, uniquement et sans réserve fait de nos pensées. Supposons que l’on puisse les saisir avant qu’elles ne se changent en « œuvres d’art »? Les attraper au vol alors qu’elles nous viennent inopinément à l’esprit ; en gravissant la colline d’Asheham, par exemple. Bien sûr, cela n’est pas possible, car le recours au langage est lent et illusoire. Il faut s’arrêter pour trouver un mot, et il y a aussi le moule de la phrase, qui demande à être rempli.« 

J’ai donc retrouvé trois photos qui illustrent d’une certaine façon mes propos sur cette parenté de la peinture et de l’écriture narrative. Elles se retrouvent dans le numéro d’avril 2012 du Magazine Littéraire. L’une nous montre l’écrivaine assise à l’extérieur, une seconde nous présente Lytton Strachey. Il est un écrivain et un biographe qui était connu de la famille. La troisième a un titre énigmatique quand on observe cette toile de 1912, Conversation Place.

La première photo que je vous fais voir est celle de Lytton Strachey. Les mots que vous verrez sont ceux que m’ont inspiré en observant attentivement la reproduction de ce tableau. Vous verrez à la droite la photo les mots de Virginia Woolf dans son texte Une esquisse du passé.

« Si j’étais peintre, je rendrais ces premières impressions en jaune pâle, argent et vert. Il y avait le store jaune pâle ; la mer verte ; le gris argent des fleurs de la passion. Je représenterais une forme sphérique ; semi-translucide. Je représenterais des pétales recourbés ; des coquillages, des choses semi-translucides ; je tracerais des formes arrondies, à travers lesquelles on verrait la lumière, mais qui demeureraient imprécises. Tout serait vaste et indistinct ; et ce qu’on verrait on l’entendrais aussi ; des sons sortiraient de tel pétale ou telle feuille – des sons indissociables de l’image.

La seconde image est le tableau de Vanessa Bell de 1912 qui a pour titre Conversation Place.

On voit donc un lieu pour une conversation où se retrouvent trois personnes. On en voit deux et on entrevoit une personne sur la droite du tableau. Cela me semble aussi énigmatique que les trois premiers paragraphes du roman Les Vagues de Virginia :

« Je vois un anneau, dit Bernard, suspendu au-dessus de moi. Il frémit suspendu dans une boucle de lumière. »

« Je vois une dalle d’un jaune pâle, dit Susan, qui s’étend jusqu’à une raie pourpre. »

« J’entends un son, dit Rhonda, gazouillis, guilleri ; gazouillis, guilleri ; qui monte et qui descend. »

La troisième tableau nous permet de voir l’écrivaine Virginia assise à l’extérieur. Cette image ouvre le dossier consacré à Virginia Woolf dans le le numéro d’avril 2012. Je vous laisse mettre des mots à cette image et vous fais aussi voir les deux premières pages de ce dossier. Cette page de droite est très significative quand vous en lirez le titre :

J’espère que vous avez apprécié cet article. Peut-être vous fera-t-il connaître cette grande écrivaine britannique que j’apprécie beaucoup.

Avez-vous lu un ou deux romans de cette écrivaine?

Si vous en avez lu plus d’un vous pourriez me dire celui que vous avez préféré dans les commentaires. Merci et au plaisir de vous lire!

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1Q84

Cet article est un voyage dans le temps. Vous verrez au point de départ quelques images et deux courts clips. Suivra un texte évoquant la trilogie de Haruki Murakami, 1Q84.

Ce voyage est un retour dans le passé car la trilogie se situe en 1984. La même année, c’est le titre d’un célèbre roman de George Orwell. Big Brother, vous connaissez, c’est dans ce roman.

C’est un long roman de plus de 1 500 pages et l’article que je vous présente est un message à mes étudiants.

Je vous faire voir un court film d’une vingtaine de secondes et en lisant le roman de Murakami vous comprendrez mon choix…

Chers étudiants,

Lors du cours de la semaine dernière je vous ai proposé comme roman à lire la trilogie 1Q84 de l’écrivain japonais Haruki Murakami et je vous ai dit que l’œuvre comptait plus de 1 500 pages. À la fin du cours, quelques uns d’entre vous m’ont demandé si je pouvais leur donner quelques pistes avant d’entreprendre la lecture d’une si longue œuvre.

Comme j’ai beaucoup apprécié ce roman et que je souhaiterais que vous l’aimiez autant que moi je vous envoie ce message qui devrait vous permettre de vous y retrouver rapidement au moment de la lecture du roman. Je ne fais état dans ce document que d’observations des deux premeirs tomes de la trilogie. En relisant cette lettre je réalise que je me suis permis d’ajouter quelques mots un peu plus personnels suite à ma lecture. Ces passages seront placés entre parenthèses…

Si j’avais à citer quelques lignes pour vous introduire dans cette trilogie je citerais les passages suivants :

« Le charme du roman tenait certainement à des descriptions précises et pleines de vie. Les lecteurs voyaient le monde qui entourait la fillette avec ses yeux, d’une façon extraordinairement colorée et vivace. »

« Que se passait-il donc? Il est inimaginable qu’Aomamé n’ait pas eu vent d’événements aussi importants. Quelque part, le système de ce monde avait commencé à détraquer. »

Vous allez me demander c’est quoi ce roman… Vous le saurez bientôt. Une seule explication pour l’instant, c’est un roman dans le roman.

L’action du roman se passe en 1984. Une année bien particulière car c’est aussi est le titre d’un roman de George Orwell. Vous avez entendu parler de Big Brother…

Et maintenant cette trilogie porte le titre de 1Q84. C’est quoi ce passage du chiffre 9 à la lettre Q?

Un petit mot sur le roman d’Orwell. On parle de l’auteur en ces mots dans la présentation du roman :

« Atteint de tuberculose depuis plusieurs années, il mourut dans une clinique de la banlieue londonienne en janvier 1950. C’est au cours de ses dernières années, alors qu’il luttait contre la mort, qu’il écrivit son roman 1984 où il exprime la plus grave inquiétude des hommes libres de notre temps. »

Retournons à la trilogie et  tentons de découvrir ce que raconte ce long roman.

Ce texte comportera trois parties : les deux premières seront consacrées aux deux protagonistes du premier tome, Aomamé et Tengo. Dans la dernière partie je vous ferai lire quelques passages du roman et vous poserai des questions qui me se sont venues à l’esprit quand j’ai lu ces lignes.

AOMAMÉ

Le premier tome du roman met en présence deux personnages importants :  Aomamé et Tengo. Ils sont les principaux protagonistes des chapitres des premiers tomes. On parle principalement d’Aomamé dans le premier chapitre et de Tengo dans le second. Il en est ainsi de cette alternance dans tous les autres chapitres de ce premier tome.

Les trois premières phrases du roman sont les suivantes :

« La radio du taxi diffusait une émission de musique classique en stéréo. C’était la Sinfonietta de Janacek. Était-ce un morceau approprié quand on est coincé dans des embouteillages. »

Je vous les cite pour vous faire voir un des procédés du roman. Nous en sommes en la page 11 de ce tome. Et quelques 200 pages plus loin on peut lire les phrases suivantes :

« Et puis la musique de Janacek.

Pourquoi ai-je su immédiatement que c’était la Sinfonietta de Janacek? Pourquoi savais-je que ce morceau avait été écrit en 1926? »

Quelques lignes plus loin on peut lire les phrases suivantes :

« Et puis pourquoi ce morceau m’a-t-il ébranlée?

Oui, elle s’était senti touchée, à titre tout à fait personnel.

C’était comme si des souvenirs latents, restés depuis longtemps en sommeil, s’étaient éveillées inopinément. Un peu comme si on m’avait saisie à l’épaule et secouée. Ce qui signifierait peut-être que quelque chose en rapport avec ce que j’avais vécu jusque-là, un lien profond, en somme, me rattachait à cette musique. »

C’est peut-être ainsi que nous entrons dans l’univers de 1Q84. Car on peut lire un peu plus loin :

« Je suis ce que je suis depuis toujours. Le monde est le monde de toujours. Pourtant quelque chose a commencé à être différent. Cela, Aomamé les ressentait. »

On passe rapidement au début sur cette œuvre musicale et ce n’est que beaucoup plus loin qu’on perçoit l’importance de ce passage. Beaucoup de questions sont posées tout au long de ces pages et souvent on doit attendre pour avoir une explication. De plus le passage vous permet d’en savoir un peu plus sur ce qu’est ce monde différent. Ce n’est qu’un début. À noter aussi qu’on est au chapitre 9 et ce chapitre porte le titre : Le paysage change, les règles ont changé. Inutile de souligner qu’il est important de porter attention au titre de chacun des chapitres.

On découvre dès les premiers chapitres qu’Aomamé a étudié le fonctionnement de tous les muscles du corps humain.  Elle travaille dans un centre sportif et vient en aide aux membres de ce centre. Aomamé est engagée par une vieille femme très riche pour donner la mort à des hommes dont les épouses ont été victimes de violences conjugales. On apprend dès le premier chapitre qu’elle avait une amie quand elle était plus jeune et qu’elle appréciait cette jeune femme.  (On peut se demander pourquoi cette précision dès les premiers chapitres du roman, mais ce n’est pas sans raison.) Il faudra passablement de temps avant qu’on en sache plus sur cette femme.  

Aomamé donne la mort à un premier homme et elle se rend ensuite dans le bar d’un hôtel pour prendre un verre afin de faire tomber sa tension nerveuse. Elle rencontre un homme qui prend lui aussi une consommation, la conversation s’engage et elle lui demande soudainement :

« — Est-ce que les uniformes des policiers ont changé récemment? Et aussi leurs armes? »

L’homme répond que cela s’est produit il y a déjà pas mal d’années.

La question de la femme tient au fait qu’Aomamé dit avoir vu le matin même un policier dans sa tenue habituelle, avec son vieux modèle de revolver.

Au chapitre suivant consacré à Aomamé, celle-ci demande à Tamaru, le garde du corps de la vieille dame :

« Depuis combien d’années les uniformes et les armes des policiers ont-ils été échangés » »

Tamaru fait alors mention d’événements qui se sont produits à la mi-octobre 1981.

Aomamé se rend à la bibliothèque municipale pour consulter les journaux sur microfilms entre septembre et novembre 1981. Dès la seconde page de ce chapitre on fait état, en quatre pages, du prince Charles et de Diana, du leader syndicaliste Walesa en Pologne, du plus grand rassemblement mondial de cerfs-volants à Jakarta le 20 septembre, de l’assassinat du président Sadate le 6 octobre, de la dispute entre un client et le collecteur de la NHK, d’un grave accident dans les mines du Yûbari et de l’affaire des changements des uniformes et des armes le 19 octobre.

Si je rapporte ces faits c’est pour vous aviser que l’on retrouve dans plusieurs pages du roman des disgressions de ce genre qui semblent un peu retarder l’évocation des faits concrets. Finalement à la fin de ce chapitre on réalise que ces pages s’inscrivaient bien dans les faits du roman car on fait dire à Aomamé :

« Bon, eh bien, nous voilà en pleine science-fiction… »

Quelques autres précisions pour bien comprendre qui est le personnage d’Aomamé :

            Aomamé a quelque lien avec Tengo qui est présent aux chapitres pairs du roman. Les deux ont une enfance difficile et les deux ont lu ce que j’ai nommé le roman dans le roman, soit le roman « écrit » par Fukaéri, La Chrysalide de l’air. On peut aussi parler d’un roman dans le roman car pour cetains personnages l’action se déroule en 1984 et pour d’autres en l’année 1Q84.

            Aomamé est fortement impliquée dans les événements en lien avec la secte   religieuse, Les Précurseurs.

            Aomamé se souvient d’avoir mis sa main dans la main d’un garçon de son âge –  10 ans – à l’école primaire. Aomamé nous fait connaître les détails du roman de Fukaéri.